Les Algériens n’ont pas mis longtemps pour répondre au discours de Bensalah, dans lequel, il a surpris beaucoup de monde en faisant part de son intention de rester dans son poste de chef d’Etat par intérim jusqu’à la tenue des élections présidentielles, qu’il souhaite du reste dans les plus brefs délais, et appelé la classe politique, la société civile et les personnalités patriotiques nationales à un dialogue «inclusif». En effet, moins de 24 heures après, cette sortie, des millions d’algériens ont investi la rue et rejeté l’offre de Bensalah à travers des marches imposantes organisées dans la majorité des wilayas du pays, à l’occasion du 16ème vendredi de la contestation populaire, le 1er après le mois de Ramadhan au cours duquel, la mobilisation est restée intacte. Les manifestants ont clairement affiché leur refus de participer à une quelconque opération électorale en présence des symboles du régime de Bouteflika, incarnés par le chef d’Etat et le Premier ministre, Noureddine Bedoui. Ils invitent ouvertement les deux ‘’B’’ à se retirer pour laisser place à une «vraie» transition démocratique. Gaid Salah, le chef d’Etat-major de l’ANP n’est pas épargné lui aussi par les critiques. On lui reproche notamment ses prises de positions jugées «contradictoires» et pas «assez osées» pour se positionner définitivement du côté du peuple algérien. A Alger, les premiers regroupements ont commencé à prendre forme, comme il est désormais de coutume, dès la matinée. Vers 10H, la foule était déjà présente au niveau de l’esplanade de la Grande-poste. Peu à peu, le nombre des manifestants s’accroit et les slogans anti-pouvoir se font de plus en plus entendre en dépit des tentatives d’empêcher les manifestants de rallier les places fortes de la contestation. En effet, un dispositif policier impressionnant a été mis en place tôt le matin et les éléments de la sûreté nationale sont fortement déployés dans le centre-ville, dont beaucoup en tenue civile. Les principaux accès menant au centre-ville ont été bouclés et l’on déplore même des arrestations opérées parmi les manifestants, pourtant pacifiques. Des points de contrôle filtrants autours d’Alger ont été mis en place et des témoignages font état d’autres barrages filtrants, de la gendarmerie nationale cette fois-ci, à l’entrée d’Alger, sur l’autoroute reliant Blida à Alger au niveau de Boufarik et de Baba Ali, ce qui a considérablement ralenti la circulation automobile sur cet axe. Pas surprenant en tous les cas tant ce genre de procédés est devenu légion à chaque marche. Comme prévisible, c’est après la prière de vendredi que la manifestation a pris de l’ampleur. Les principales artères du centre-ville, allant de la place du 1er mai à la Grande-poste, en passant par la rue Hassiba Ben Bouali et le boulevard Amirouche, jusqu’à la placette Audin et la rue Didouche Mourad étaient noires du monde. Sans surprise, le tunnel des facultés est fermé par la police. Qu’à cela ne tienne. L’ambiance est, comme toujours, familiale. Les manifestants passent leurs messages via les slogans. ‘‘Bensalah dégage’’, ‘‘Gaid Salah dégage’’, ‘‘Pas d’élections avec la bande et les imposteurs’’, ‘‘Pour un Etat civil’’, “Yetnahaw Ga3” (Ils partent tous) ont été longuement entonnés par les manifestants.
Liès Bouroui