Le Conseil de sécurité a adopté avant-hier la résolution 2654 sur le Sahara occidental en exigeant notamment des deux parties la reprise des négociations dans la perspective «d’une autodétermination du peuple du Sahara occidental», marquant l’échec du Maroc à imposer «son plan d’autonomie exclusif», à gommer toute référence au référendum, et à qualifier l’Algérie comme partie prenante du conflit.
La résolution, dont 13 membres ont voté pour, a été marquée par l’abstention de la Russie et du Kenya qui ont dénoncé un texte non équilibré.
Si la Chine qui a recentré depuis 2018 sa position sur le dossier, avec une «neutralité équilibrée», la France s’est pour la première fois abstenu de commenter la résolution ou de jouer un rôle de premier plan dans le choix sémantique.
Bien que le Maroc se soit empressé de saluer la résolution en estimant qu’elle conforte sa position, le Conseil de sécurité lui a infligé un double camouflet en rejetant les préconditions qu’il veut imposer ainsi que le rappel de la finalité des négociations : une solution mutuellement acceptable dans la perspective d’une «autodétermination du peuple du Sahara occidental» conformément au mandat de la MINURSO, renouvelé pour une année.
La résolution 2654 appelle «les parties à reprendre les négociations sous l’égide du secrétaire général sans préconditions et de bonne foi», avec l’objectif de parvenir à «une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable» dans la perspective d’une «autodétermination du peuple du Sahara occidental.»
Le Maroc est directement visé par le terme «sans préconditions» en raison des conditions, sur le fond et sur la forme, qu’il veut imposer à l’émissaire de l’ONU, l’Italien Staffan de Mistura, comme préalable à la reprise des négociations. Sur le fond, le Maroc veut imposer comme unique voie celle qu’il s’est choisi en 2007 : l’autonomie et rien que l’autonomie, sous sa souveraineté. Quant à la forme, le Maroc multipliant les obstacles pour ne pas négocier, conditionne l’exécution des résolutions qui l’invite à négocier «sans préconditions et de bonne foi» au maintien du format dit «de table ronde» avec 4 représentants, à savoir le Royaume, le Polisario ainsi que les deux pays voisins directs ; l’Algérie et la Mauritanie.
Au fil des rares rounds de «pourparlers» avec ce format, le Maroc a montré qu’il n’est pas intéressé par la résolution du conflit de décolonisation, selon la solution validé par le Conseil de sécurité depuis 1991, mais uniquement pour argumenter ses éléments de langage sur «la preuve de l’implication de l’Algérie», une «partie des parties» du conflit.
Et c’est le troisième camouflet pour le Maroc. La résolution 2654 a exprimé le soutien total du Conseil de sécurité à Staffan de Mistura, envoyé personnel pour le Sahara occidental, malmené et entravé par le Maroc. Il est demandé aux deux parties, Maroc et Polisario, ainsi que les deux voisins, l’Algérie et la Mauritanie, de soutenir les efforts de Staffan de Mistura. La résolution encourage vivement «le Maroc, le Front Polisario, l’Algérie et la Mauritanie à s’engager avec lui pendant toute la durée du processus pour assurer un aboutissement réussi.»
Quant au Polisario, constant, il a accepté, sans dévier de sa position initiale, depuis 1991, de négocier «sans aucune condition» pour parvenir à l’autodétermination. Le Polisario a, rappelant-le, accepté que le peuple du Sahara occidental, dont il est l’unique représentant reconnu, choisisse librement, entre la proposition marocaine -l’autonomie- ou l’indépendance. C’est aussi la position des deux voisins concernés ; l’Algérie et la Mauritanie.