Le 19ème vendredi de la protesta’ a été sans doute le plus musclé depuis le 22 février dernier, date du début du mouvement populaire en Algérie en signe de contestation contre le 5ème mandat de Bouteflika. En tous les cas à Alger, la tension était palpable dés l’apparition dans la matinée des premiers rassemblements des citoyens, surpris déjà par un dispositif encore plus impressionnant que ceux des précédentes manifestations. Le centre-ville était quasiment bouclé, de la Grande-poste jusqu’en haut de la rue Didouche Mourad où les forces antiémeutes ont couvert les lieux qui devaient être occupés par les manifestants. S’en suivra ensuite, et durant toute la journée, une véritable chasse à l’homme, du moins pour tous ceux qui étaient en possession d’un sac à dos. La fouille était systématique. La raison ? Bien évidemment, les policiers guettaient d’éventuels drapeaux amazighs que le chef d’Etat-major de l’ANP avait décidé, la semaine passée, d’interdire dans toutes les manif’ sous prétexte de porter atteinte à l’unité nationale. Mais il semble que l’appel du général de Corps d’Armée n’a pas été entendu par tous les Algériens lorsqu’on aperçoit qu’un grand nombre de citoyens l’ont encore exhibé ce vendredi même si cela leur a valu des arrestations, en sus de la confiscation de l’emblème. Des personnes âgées ont même subi des traitements pas vraiment corrects, à la limite de la violence au grand dam des manifestants qui ont fait part de leur «dégoût» de cette montée au créneau.
‘‘Unis nous sommes, unis nous resterons’’, ‘‘Khawa khawa, wihda wataniya makanche jihawiya’’ (Tous des frères, unité nationale, pas de régionalisme), ‘‘Nous sommes amazighs jusqu’au cou’’ ou encore ‘‘Etat civil, non militaire’’ ont été en effet longtemps scandés par les citoyens sous un soleil de plomb, en sus des slogans habituels dont ‘‘Bensalah, Bedoui dégage’’, ‘‘Pas d’élections avec la bande et les imposteurs’’, ‘‘Pour un Etat civil et démocratique’’, ‘‘Djeich chaâb khawa khawa’’ ou encore “Yetnahaw Ga3” (Ils partent tous). Réitérant encore une fois le caractère pacifique de leur action, les manifestants assurent ne reculer devant rien, encore moins cette répression qui ne dit pas son nom, et soutiennent qu’ils ne s’arrêteront pas jusqu’à la concrétisation totale des revendications du peuple, à savoir le départ de tous les symboles du régime de Bouteflika, incarnés par le chef d’Etat par intérim, Bensalah, et son Premier ministre, Bedoui. Ils ont exprimé à ce sujet leur détermination de voir s’installer une vraie transition démocratique qui peut être traduite par la désignation d’une instance collégiale dont les membres désignés doivent être crédible, honnêtes, intègres et n’ayant aucun antécédent avec ‘’Îssaba’’ (la bande). Toujours aussi déterminés comme jamais, les Algériens se donnent déjà rendez-vous le 5 juillet prochain pour un 20ème vendredi qui s’annonce grandiose tant la symbolique de la date n’est plus à démontrer. On se prépare déjà sur les réseaux sociaux à cette énième sortie qui s’apparente pour eux à une seconde indépendance de l’Algérie.
Liès Bourouis